Les Echos n° 17.963 du Lundi 16 août 1999, p. 12
LES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
TÉLÉCOMMUNICATIONS
Le consortium de télécommunications par satellite, emmené par
l'américain Motorola, est virtuellement en faillite. Les dirigeants se
donnent trente jours pour mener une opération de restructuration complexe
et drastique.
Iridium demande la protection de la loi
américaine sur les faillites
En proie à d'extrêmes difficultés financières, l'opérateur de
téléphonie par satellites Iridium a dû se résoudre vendredi à demander la
protection de la loi américaine sur les faillites (chapitre 11) qui permet
à une société en difficulté de reporter le règlement de ses créances
pendant qu'elle cherche un moyen de redresser la situation financière. Le
consortium, emmené par le géant américain de l'électronique Motorola
qui détient 18 % du capital espère ainsi avoir le temps de mener à
bien son « plan de restructuration financière ».
Si un communiqué,
publié vendredi, affirme que « les actuels et futurs clients d'Iridium ne
seront pas touchés par cette action », la marge de manoeuvre va être
extrêmement étroite pour l'opérateur à la tête d'un projet global de 5
milliards de dollars (4,72 milliards d'euros). D'un point de vue financier
d'abord (« Les Echos » du 13 août). En retard sur ses objectifs
commerciaux depuis le démarrage en novembre dernier, l'opérateur a admis
mercredi être dans l'impossibilité d'honorer le jour même le remboursement
d'une dette de 1,5 milliard de dollars.
L'action est tombée à 3 dollars
Iridium devait en outre s'acquitter hier du paiement d'un second
remboursement, de 90 millions de dollars, contracté cette fois-ci pour
rembourser un emprunt sensé couvrir le risque d'insolvabilité. En
conséquence, les dirigeants d'Iridium dont l'action valait un peu
plus de 3 dollars vendredi soir contre 50 dollars en novembre dernier
vont devoir s'engager dans une inévitable et drastique
restructuration, qu'ils espèrent pouvoir mener à bien dans les trente
jours. La tâche ne va pas être moins compliquée pour le consortium dans
les domaines commerciaux, marketing et techniques.
Certes, Iridium
avait gagné la course contre la montre, en ouvrant son service commercial
dès la fin d'année dernière, coiffant sur le poteau son concurrent
Globalstar (Loral, Alcatel, France Télécom). Mais malgré ses 66 petits
satellites en orbite, l'opérateur a rencontré des problèmes techniques. Il
a surtout souffert d'une tarification beaucoup trop élevée et a totalement
raté son marketing. « C'est vrai. Iridium a visé un marché de masse qui
n'existait pas. Mais, depuis le début juillet, l'offre vise les secteurs
verticaux comme l'exploration minière, les ONG, les administrations comme
l'armée ou les douanes, les BTP, les médias. On vise désormais moins le
nombre de clients que le trafic », reconnaît Patrick Gibassier, directeur
commercial de TDCom, qui distribue le service Iridium en France.
L'opérateur a aussi dû réviser ses prix à la baisse, en divisant par trois
celui des terminaux (environ 8.000 francs) et par deux la minute de
communication (de 10 à 20 francs aujourd'hui).
Mais Iridium a
par-dessus tout gravement sous-évalué l'explosion du téléphone cellulaire,
dont la couverture géographique s'est révélée beaucoup plus importante
qu'au lancement du projet Iridium. Les difficultés du consortium vont
aussi affecter les projets concurrents.
Le britannique ICO (groupe
Inmarsat) qui cherche encore un million de dollars pour être en mesure de
lancer son service à la fin de l'année prochaine et Globalstar (Loral,
Alcatel, France Télécom), ont ainsi vu leur cours de Bourse plonger en fin
de semaine dernière.
F. N.
|